Service en salle : la vision moderne de Shawn Joyeux chez Alliance
Paris (75) Directeur de salle de son restaurant, il défend l’autonomie, la curiosité et l’engouement pour un métier qu’il voudrait voir davantage valorisé.
Shawn Joyeux et Toshitaka Omiya ont ouvert Alliance (Paris, Ve), fin novembre dernier. Secondé par Antoine Housset, le directeur de salle fait vivre le service et les 25 places avec une présence qu’il souhaite “juste et justifiée“. L’homme parle d’un contexte difficile, “la salle, c’est un métier qui n’est pas déprécié, mais qui est mal valorisé“, notamment à cause d’une perte de personnalisation du service. “Le travail individuel est moins mis en avant. À l’école, on apprend surtout aux jeunes à fonctionner en brigade. Mais dans une petite maison, on n’a ni sommelier, ni commis, alors on apprend à regarder les verres, le pain et à travailler de façon autonome.” Pour Shawn Joyeux, la qualité du service passe par l’apprentissage des bons gestes et réflexes, puis les variations et enfin seulement l’improvisation. “On peut alors prendre de l’envergure, avoir un jeu de scène naturel, éventuellement plaisanter, mais il faut avoir de l’engouement.” Shawn Joyeux croit beaucoup en l’autodidactisme. “On peut faire des miracles avec de la bonne volonté. Il faut savoir écouter, apprendre et entendre.” Bac littéraire en poche, qu’il découvre les métiers de salle comme serveur dans une brasserie. Il développe ce qu’il appelle le “rapport immédiat à la satisfaction” des clients. Il poursuit dans la restauration traditionnelle et l’hôtellerie, et rencontre Louis Villeneuve (L’Hôtel de ville de Crissier), un monument du service selon lui, capable d’aborder n’importe quel sujet. “Il m’a appris à être à l’écoute de tout ce qui se passe et d’avoir un mot sur chaque chose, pas un avis, mais un mot.” Au Bristol (Paris) ensuite, il connaît l’arrivée des trois étoiles Michelin, puis il fait la connaissance de Laurent Lapeyre qu’il suit à l’Agapé (Paris) où il gravit les échelons et rencontre le chef Toshitaka Omiya. De la tradition au service d’aujourd’hui “Trouver l’équilibre entre le service tel que l’on a appris et une vision moderne de la salle, c’est essentiel. On n’est pas là pour s’imposer. Si le client a juste envie de manger, c’est normal. Il y a des maisons où l’on s’écoute plus que le client.” Dans ce nouvel établissement, le confort a été privilégié avec des tiroirs à couverts insonorisés, une machine à café silencieuse, des placards avec bouton poussoir, “des fauteuils où l’on a envie de rester le plus longtemps possible“, ajoute Shawn Joyeux. Les clients sont accompagnés pour aller aux toilettes, “ce sont des choses simples qui font la différence“. Selon le directeur de salle, il est aussi indispensable de connaître la cuisine et de s’intéresser aux produits et à la carte. Durant son parcours, il lui est arrivé de passer de la salle à la cuisine et d’y rester huit mois à apprendre à faire des crèmes brûlées, des sauces… “La restauration, c’est une culture qu’il faut nourrir tout le temps. Je ne viens pas ici pour travailler, je vis de ma passion.” Et quand les clients s’en vont, Shawn Joyeux les remercie d’être venus. “J’ai reçu un e-mail d’un client qui me disait : ‘on est bien chez vous’. Cela donne des frissons.”
Laisser un commentaire